Un conseil avec les films de Gus Van Sant : ne pas attendre de les regarder à la télévision au risque de zapper. Non pas que le film, comme Elephant d'ailleurs, soit ennuyeux, mais filmer un fantôme, une ombre ou encore l'état d'esprit (sans faire du psychologisme) de quelqu'un qui va partir, implique une adhésion voire une concentration du spectateur.
N'attendez pas à trouver dans ce film des éléments pouvant expliquer le suicide de l'idole Kurt Cobain mais vous y trouverez des éléments totalement vrais sur ce qui s'est passé.
N'y allez pas pour la musique de Nirvana : Miss Courtney Love en gardienne du temple et des finances n'a pas donné les droits. Par contre, vous écouterez quelques morceaux fantastiques et notamment un toujours aussi sublime Venus in Furs du Velvet, une des références de Nirvana. La bande originale est superbe : Thurston Moore, âme de Sonic Youth, a été le conseiller musical du film.
N'y allez pas pour l'action, l'intrigue ou le suspens, il n'y en pas. C'est une atmosphère que filme d'une manière toujours esthétique Gus Van Sant, celle d'un homme qui est devenu l'ombre de lui même, pas encore mort mais déjà fantôme que plus rien n'atteindra. Le jeu de l'acteur, dont la ressemblance avec Kobain est ahurissante, est fantastique et nous rappelle qu'être acteur ne signifie pas seulement parler ou déclamer.
Mais le meilleur de ce film ce sont sans doute la caméra et l'esthétique : il y a quelques plans, le personnage principal filmé de loin depuis l'extérieur du bâtiment, ou encore la scène de découverte du corps, qui sont des scènes d'anthologie sur lesquelles on n'a sans doute pas fini de discuter tant leur portée technique et esthétique est forte.
Et puis, parce que filmer une atmosphère implique sans doute d'amener le spectateur à rompre avec ses perceptions et ses représentations traditionnelles, Gus Van Sant, film avec une luminosité, des couleurs et un grain d'image présents tout au long du fil que le réalisateur nuance peu à peu. Mais preuve que Gus Van Sant construit une oeuvre, ces éléments ne sont pas sans rappeler ses deux derniers films...
Bref à voir
Breizh Skiff Project, YCCarnac.
